« Des vacances de merde, tu passeras… »

Réconfort - par Stéphane Bourdet (2007)Qui dit vacances, dit espoirs. Léa et Doni avaient espéré des rencontres, des rencontres heureuses de préférence. Mais, c’est bien connu, on obtient pas toujours ce qu’on veut…

A l’heure du bilan, les deux copines en étaient là : Léa avait surpris son bouboule en train de roucouler avec une jeune délurée. Doni avait assisté à la naissance d’une idylle entre l’homme de sa vie et « l’homme de sa vie » de celui-ci. Pour les deux jeunes filles, c’en était trop. « Viens on bouge ! J’ai reçu un texto de Nico, ils sont à deux heures de train d’ici. » C’est tout. Une heure plus tard, les deux amies avaient disparu, envolées.

Doni commençait doucement à se sentir mieux. Elle savait que le train l’emmenait vers un monde rassurant, un monde connu. Elle se détendait. Elle savait que ce soir elle s’endormirait dans les bras de Nicolas, cet ami - amant de longue date qu’elle connaissait par cœur, qu’elle savait sans surprise. C’était exactement ce dont elle avait besoin : oublier Monsieur Parfait, oublier les mauvaises cuites, oublier les rencontres foireuses…

Après trois semaines de vacances au bord de mer, Doni n’avait plus besoin que de réconfort. A n’en point douter, c’était devenu son droit le plus inaliénable : elle l’avait durement payé de ses larmes. Et, après toutes ces années d’amitié amoureuse, Nico se présentait comme un vieux fauteuil, chaleureux, confortable, moulé à point par des années d’utilisation… un vieux fauteuil que l’on rêve de remplacer, mais dans lequel on est toujours heureux de s’installer, en attendant

… c’est bien connu, on obtient pas toujours ce qu’on veut.

« Est-il écrit quelque part que ces vacances se doivent d’être merdiques ? C’est qui cette pouffe ? » souffla Doni en apercevant la grande brune accrochée au bras de son Nicolas. Une fille plus quelconque tu meurs ! Doni sentait monter en elle une haine sans nom. Elle était qui cette conne pour oser s’installer dans Son vieux fauteuil confortabilissime ?

« Salut, elle c’est Véronique, lui lança Nico, d’une traite, beau de bonheur. On s’est rencontré le mois dernier. Depuis le temps que je veux te la présenter… ben voilà, c’est fait. » Doni savait son sourire crispé, sa voix tendue. Un mois ! Me la présenter ! Elle savait ce que ça signifiait : pour son Nico, c’était une histoire sérieuse.

Doni jeta un œil derrière elle, et l’espace d’un instant elle hésita. Le train était toujours là. « Doni, tu viens ? » C’était si tentant ! C’était même la seule chose qui lui faisait envie : tourner les talons, sauter dans ce train, le laisser l’emmener au bout du monde. « J’arrive… »

Le petit miracle du vendredi soir

Elle a encore toutes ses dents !

Des fois, je joue à des jeux dangereux. Je le fais pas toujours exprès remarquez, mais… quand même.

Le dernier en date : rouler avec 3 litres d’huile en trop dans le réservoir d’huile moteur… Et là, ceux qui ont un minimum de notions en mécanique voiture se disent oh my god !

C’est gentil de vous inquiéter comme ça pour moi. Si, si. Mais, soyez rassuré : ma voiture va bien. Je vous assure… enfin, je crois… j’espère.

Bon week-end.

L’enfer est une plage pavée de questions - réponses

Quel est le pire : les questions ou les réponses ?Doni avait fini par retrouver l’homme de sa vie. Mais à peine l’avait-elle rejoint, que de nouveau elle le perdait. L’œil mauvais, désabusée, elle avait du mal à accepter son sort. Impuissante, elle ne pouvait qu’observer : assis au comptoir, Sébastien était en train de flirter avec sa toute nouvelle conquête.

Et vous savez le pire ? Avec tout ça, Doni n’avait toujours pas de réponses à ses questions. « Que diable s’était-il donc passé la veille ? Comment avait-elle pu croire l’affaire conclue au point d’en perdre la tête ? »

C’est sur la plage, en début d’après-midi que Doni avait retrouvé Sébastien. Avec le naturel dont lui seul avait le secret, il lui avait juste demandé : « Bien rentrée ? Chouette soirée hier, non !?» Doni en resta… septique. Elle avait envisagée de nombreuses possibilités : la bouderie, les insultes, la colère, de difficiles explications… tout, mais pas cette indifférence !

Évidement, dès son retour au camping, Doni avait questionné Léa. Comment diable, avait-elle pu finir dans le lit du mauvais type ? Mais la réponse de son amie ne l’avança guerre : « je vous ai laissé en train de rire ensemble, je reviens dix minutes plus tard… lui et ses copains se sont envolés et toi tu me présente un type trooop bien !? J’ai bien essayé de comprendre, mais tu m’as envoyé bouler. »

Face à l’homme de sa vie, Doni prit donc l’option la moins risquée : « heu ! Oui, vraiment bien cette soirée. Et… toi ? Justement avec Léa on se disait qu’on ne vous avait même pas vu partir, est-ce qu… » Doni ne savait même pas comment finir cette phrase. Elle avait juste envie de l’attraper par les épaules, de le secouer, de lui hurler « putain, mais qu’est-ce qui s’est passé ? Pourquoi, mais pourquoi j’ai pas fini la nuit dans Tes bras ? »

« Ah oui, ça nous a pris subitement. On s’est dit qu’on finirait bien la soirée dehors, sur la plage. C’était bien, tu aurais dû venir. » Doni en resta interloquée, elle se sentait perdue, humiliée. Tout s’embrouillait dans sa tête, les rires, le bien-être, son réveil après d’un inconnu… Comment… Pourquoi… ??

C’est au moment où Doni sentit son esprit vaciller qu’elle était apparue, telle une hallucination. Carla qu’elle s’appelle ! Elle avait débarqué comme un guêpe au beau milieu d’un pique-nique. Et salut, et ça va depuis hier soir, et au fait je te présente mon cousin, et il s’appelle Cyril, et bla bla… En une fraction de seconde, sous le regard médusée de Doni, tout bascula. C’est alors qu’elle sut. Elle sut avec certitude qu’elle était la fille la plus malheureuse au monde. La tension qui s’était installée tout de suite entre les deux hommes ne laissait que peu de place au doute.

Plus tard, Doni qui n’arrivait toujours pas à comprendre la soirée de la veille, ni à se faire une raison, fut témoin de leur premier baisé, puis du second, puis… poussée par une puissante envie de glace au chocolat, elle partie excédée.

Les vapeurs de Cendrillon

Cendrillon - La lecture en cadeau - Fondation pour l'alphabétisation (Quebec)Doni regardait l’homme qui dormait à ses côtés. C’est pas qu’il était laid ou quoi. Le problème était plutôt qu’elle ne savait absolument pas qui il pouvait bien être. Elle se demandait comment elle était arrivée là, dans cette tente… ? Et surtout : qu’avait-elle fait avec ce type ? Oui, bon, elle s’en doutait un peu quand même parce que elle était nue, il était nu… finalement une seule question se posait vraiment : comment sortir d’ici discrètement, sans réveiller le bonhomme ?

L’enchainement des évènements de la veille lui revenait peu à peu en mémoire : toute à son obsession du moment, Doni avait croisé celui qu’elle savait être l’homme de sa vie à de multiples reprises (pur hasard vous dit-on !). Au détour d’une de ces rencontres il lui avait parlé du club, celui où il retrouvait ses amis presque chaque soir. A l’instant même où il lui en parla, Doni su qu’elle y trainerait Léa et son bouboule de copain.

Le soir venu, Doni mit donc en œuvre tous ses talents pour 1- se pomponner, 2- expliquer à Léa l’urgence de la situation. Elle en était persuadée : ce soir serait Leur soir. Petite robe, manucure impeccable, maquillage hardent, allure féline, jamais Doni ne s’était sentie plus désirable qu’en entrant dans ce club. L’homme de sa vie était là. Il lui sourit, elle lui sourit, tout était dit.

Il lui offrit un verre, puis un autre, puis… toujours les yeux dans les yeux. Alors, Doni s’était abandonnée : portée par la musique, grisée par l’ambiance, elle savourait le délicat jeu de séduction qui s’était installé. Elle était conquise, il le savait. Le monde pouvait s’écrouler, pour Doni, seuls comptaient désormais le sourire de l’homme de sa vie et son regard bienveillant comme objet de toutes ses obsessions.

Perdue dans le souvenir de cette soirée parfaite, Doni sentit un contact, une main furtive sur la peau délicate de sa cuisse. Avant qu’elle ne réalise, la caresse délicate s’était déjà transformée en contact franc et très explicite. L’homme - cet homme qui n’était pas l’homme de sa vie ! - se rapprochait, de tout son corps nu, manifestement enfiévré. Pour lui, c’était déjà une évidence. Il ne posait pas une question, il clamait haut et fort : ramène ton cul par ici, j’ai envie.

Doni sentit monter en elle un désir irrépressible : vomir. Son estomac fut pris de violents spasmes… il fallait qu’elle sorte d’ici. Maintenant. « Tu vas où ? Reviens vite, j’ai… » « Oui, oui, je… faut que j’aille aux toilettes ». Doni ne savait pas où elle était, ni où elle devait aller. Elle ne savait qu’une seule chose : il fallait qu’elle parte loin, qu’elle prenne une douche, qu’elle oublie cette tente, ce type, cette nuit dont elle ne gardait manifestement pas les bons souvenirs.

Franchissant l’entrée du camping, l’obsession revient : le regard bienveillant. Où est-tu homme de ma vie ? Pourquoi je suis là, et toi pas ?

Cendrillon remise au goût du jour par Dina Goldstein

Rencontre du troisième type

Rencontre du troisieme type (image issue du film de Steven Spielberg)« Je n’y comprends rien ! Ce type là, c’est l’homme de ma vie, j’en suis sûre, je le sens au fond de moi… mais je n’y comprends rien. Tu vois, d’habitude, quand un type me plait, j’arrive à… au moins il me remarque. Mais là, rien. Comme si j’étais juste personne. T’y comprends quelque chose toi ? »

Doni avait croisé le regard de l’homme de sa vie dans un moment d’ennui profond. A cet instant, ses grands yeux noirs l’avaient littéralement électrisée. Il était alors près de 18h et aux quatre coins de la plage les gens commençaient à s’en aller. Assise sur sa serviette Doni contemplait discrètement les marques de son maillot ; elles commençaient doucement à s’installer. « Chouette ! » Par contre, il devenait aussi évident que ses poils commençaient déjà à pointer le bout de leur nez. « C’est chiant ça ! ».

Un peu plus loin, Léa jouait dans l’eau avec son nouveau boyfriend. Un petit blondinet un peu bouboule. Anglais, gentil, mais bouboule. « Ça aussi, c’est chiant. » Tout à la contemplation de ses poils naissants, Doni pestait. « Et voilà, Madame rencontre un type, et dans la seconde je n’existe plus. Super les copines. J’adore. Bon, ça va maintenant, ça va faire deux heures que je m’ennuie. Je vais la chercher ! »

Elle n’avait pas fini sa phrase que déjà Doni oubliait Léa. Dans son élan, elle leva la tête. Son regard fut aimanté par deux yeux immenses, noirs, rieurs. Un frisson d’excitation parcouru Doni des pieds à la tête et une fraction de seconde lui suffit pour rassembler ses affaires et s’élancer à la poursuite de l’homme de sa vie.

Doni avait flashé sur ses yeux. Maintenant, elle ne pouvait plus détourner les siens de son cul. Petit, bien rebondi, moulé dans son maillot humide, il était parfait. Et l’homme autour de ce cul parfait, était plus parfait encore. Grand, la peau mate, des épaules solides, de longues mains très fines, un sourire ultrabright, une classe folle. Quand il lui dit « bonjour », Doni crut s’évanouir. Sa voix était chaude, suave, envoutante.

Une telle perfection était un vrai mystère. Mais son attitude était plus étrange encore. Doni s’était arrangée pour croiser l’homme de sa vie à de multiples reprises. A chaque fois, ils avaient échangé quelques mots, quelques rires. Pourtant, à aucun moment Doni n’avait pu déceler quoique ce soit dans son attitude : ni surprise, ni ras le bol, ni enthousiasme. Croiser cette fille - magnifique ! - toutes les heures, partout, où qu’il aille ne semblait pas perturber Monsieur outre mesure.

« Tu y comprends quelque chose toi ? »